Madame le Consul

J'ai déjà parlé de Pavlina et j'en parlerai encore, c'est un des éléments incontournables de Mannes. Comme on dit en Allemagne, elle connaît Dieu et le monde et tente de convaincre tout musicien qu'elle rencontre de rejoindre notre glorieux établissement. Elle est la directrice artistique du festival de l'école, qui consiste en une série de concerts qui ont lieu une fois par mois avec un thème par an, généralement un compositeur. L'an dernier c'était Mendelssohn, maintenant c'est le tour de Schumann et pour l'occasion elle arrive à dénicher dans les vieux cartons des morceaux que ce cher Robert a dû amèrement regretter de ne pas avoir brûlé. Les concerts sont encore et toujours réservés aux sponsors de l'école, donc pour résumer c'est à peu près les mêmes personnes qui jouent pour le même public, mais à chaque fois dans un endroit différent, c'est la touche fun de l'évènement. Nous avons performé, comme on dit ici, au Consulat d'Allemagne il y a quelques jours, c'était fort sympathique, pour la première fois j'avais l'impression d'être en Europe (je reviendrai sur la beauté des normes européennes prochainement...) rien qu'à la tête du piano. Car ici les pianos ne sont pas vernis comme partout ailleurs dans le monde, ils sont complètement mats, on dirait qu'ils ont 150 ans. Ah rectification: en fait ils ont réellement 150 ans. Pas moyen de trouver un instrument potable dans le coin.

Bref, à la fin du concert nous allons tous de nouveau saluer le public et c'est le moment que choisit à chaque fois Pavlina pour jaillir sur la scène et débiter un discours de circonstance agrémenté de mièvreries de haut vol. Cette fois-ci elle est partie sur un délire de Saint-Valentin (alors que la majorité de l'auditoire ne devait plus avoir célébré ce jour béni depuis quelques siècles) puis elle a dit au consul que la musique devait être nommée langue universelle par l'ONU (le consulat est juste en face du siège des Nations Unies) et d'autres sornettes dans le style alors que nous étions coincés sur scène avec un sourire crispé en essayant de ne pas avoir l'air trop consterné.