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Lout à New York

Graduation recital

23 Février 2011, 01:31am

Publié par Lout

La saison des "recitals de graduation" a repris son cours effréné à la différence près que cette année, je devais présenter un concert moi-même. J’avais plus en moins en tête ce que je voulais faire depuis un moment, mais bosser avec des chanteurs, c’est travailler avec de la dynamite : on ne sait jamais s’ils ne vont pas vous exploser dans la main. Et encore, j’avais choisi des gens que je savais particulièrement fiables. Le programme était totalement moi : les 3 sonnets de Pétrarque de Liszt (l’ami Franz c’est la seule faiblesse de pianiste soliste qui me reste. Et quelques uns se rappelleront de notre conférence Power point sur Liszt et l’Italie), les Dichterliebe de Schumann, (inévitable Robert) que j’ai tellement joués à Salzbourg et ma propre réduction pour piano des Folk Songs de Berio, l’œuvre que j’ai étudiée lors de ma première année au conservatoire, la boucle est bouclée.  Mon ténor était Chee Shen, le chinois dont j’avais déjà parlé, je l’avais repéré dès le début des cours, ensuite j’ai eu l’honneur d’avoir notre sublime baryton Suchan, l’idole de mon coloc Johannes qui décrit sa voix en ces termes : "when he starts to sing, you just want to undress yourself." Je l’ai prié de se contenir pendant mon concert, bien qu’il n’ait pas tort. Je me souviens du jour où il avait chanté "Allerseelen" (Toussaint) de Strauss l’an dernier pour le cours de lieder allemands, lorsqu’il a relevé le nez de sa partition à la fin, il nous a regardés stupéfait, sans comprendre pourquoi tout le monde, la prof incluse, était en larmes.

Puis pour le Berio j’ai demandé à Shirin, une Canadienne d’origine iranienne que j’adore. C’est le genre de fille avec qui j’ai tout de suite senti qu’on serait super copines mais finalement on ne se voit pas trop car on n’a pas vraiment d’autres amis en commun et on a chacune notre vie. C’était donc l’occasion de travailler ensemble et je savais qu’elle serait parfaite pour ce répertoire.

 

Les répétitions ont été du bonheur pur, même si on a été un peu juste au niveau du temps, un lieu commun pour les accompagnateurs, je passe ma vie à être ric-rac. La générale a été épique, elle a eu lieu dans la salle le matin à 10h (heure impossible que ce soit pour les chanteurs ou pour moi) et d’un coup débarque un type à l’allure de Placido Domingo qui s’installe solennellement au premier rang. J’ai vu Shirin changer de couleur, en fait il s’agissait du baryton-basse le plus connu des Etats-Unis, qui ne se prend par pour la moitié d’un camembert puisqu’il s’est auto-classé dans la liste de ceux qu’il appelle "i Famosi" avec la Callas. Il donnait une masterclass juste après nous. Moi je ne le connaissais pas donc je m’en fichais, mais Shirin s’est exclamée après "c’est pas croyable qu’à 10h du matin dans le Concert Hall de Mannes, se pointe justement la dernière personne que j’avais envie de voir là, alors que je chante en plus de la musique super bizarre!" J’étais morte de rire et je lui ai répondu qu’il avait eu l’air d’apprécier puisqu’il était resté jusqu’au bout.

Puis ma coloc Camille, que j’avais engagée pour filmer le concert, m’a demandé si elle pouvait utiliser mon récital comme sujet de documentaire pour son école. Elle est donc venue filmer une répétition, puis les coulisses avant, pendant et après, me suivant partout, j’avais l’impression d’avoir mon propre show de télé-réalité. Un peu plus et je me faisais appeler Loana.

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Le concert va rester un de mes meilleurs souvenirs musicaux, ils ont tous été fantastiques, Suchan a évidemment scotché tout le monde, Elad a même exceptionnellement lu la traduction du texte pour savoir de quoi il causait et Shirin a été meilleure que je ne l’avais imaginé. J’ai été encore plus surprise en écoutant l’enregistrement, je suis vraiment contente du résultat. Après tout, c’est un projet que j’avais en tête depuis près de 20 ans! Comme bis j’avais choisi la chanson de Poulenc "Nous voulons une petite sœur" que j’avais étudié à la même époque (Laura s’en souvient encore) et comme le texte était d’une importance capitale, j’avais chargé le frangin de faire passer la traduction. Celui-ci a très scientifiquement distribué une feuille à tous les auditeurs présents, ce qui fait que j’ai dû lui demander d’accélérer le processus depuis la scène! Ah ces Français, qu’ils sont drôles.

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