Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Lout à New York

Carnegie!!

22 Décembre 2010, 22:25pm

Publié par Lout

 

J’ai donc été choisie pour jouer au concert annuel de Mannes, avec Paul, un des ténors stars de l’établissement, qui ne s’appelle en fait pas Paul, mais comme la plupart des coréens il a un deuxième prénom chrétien. Il est super rigolo, j’avais l’impression d’avoir un gamin de 5 ans avec moi. Très heureux d’avoir une confidente qui ne soit ni coréenne ni américaine, il me racontait qu’il n’osait dire à personne que sa copine avait 3 ans de plus que lui, de peur du scandale. En ma qualité de Française, donc forcément dévoyée, il estimait, sans doute à juste titre, que j’avais dû en entendre d’autres.  

Comme le festival cette année était dédié à Schumann et Chopin, nous avons joué quelques lieders au milieu d’une avalanche de pianistes, la directrice artistique Pavlina oblige. Chuck et ses potes avaient d’abord été pressentis pour jouer un quatuor de Schumann, mais comme tout ça manquait sérieusement de piano, à la place de leur coller un de ses élèves pour jouer le quintette, elle a préféré écumer les fonds de tiroirs et exhumer les "Variations sur La’ ci darem la mano" pour piano et orchestre de chambre, l’opus 2 de Monsieur Chopin. C’est la pièce dont Schumann s’était exclamé dans un de ses articles "Chapeau bas Messieurs, un génie", lançant ainsi la carrière de Frédéric. Tout le monde sait donc qu’elle existe, mais personne ne l’a jamais entendue, pour une bonne raison d’ailleurs. Le plus admirable dans l’histoire, c’est le talent de visionnaire de Robert pour avoir entrevu le futur Chopin dans cette daube. Ainsi que celui de Pavlina pour réussir à caser ses tubes du grenier.

Nous avons eu droit à un coaching privé chez notre star bulgare quelques jours avant le concert, où elle nous a sorti le grand show. Elle a d’abord relégué au canapé la pauvre asiatique qui avait cours à ce moment-là, ensuite j’ai eu droit à un cours de piano (auquel je crois qu’elle a senti que j’étais plutôt réfractaire), puis elle a commencé à parler de Mirella Freni et d’un chanteur bulgare avec qui elle avait joué. Paul, fasciné, lui posait en plus des milliers de questions, du genre "Mais qu’est-ce qui fait qu’ils étaient si extraordinaires?", un bonheur pour Pavlina, enchantée d’avoir un public si réactif. Elle nous a déballé tous ses disques, de la mort de Boris Godounov à "Je veux vivre"  du Roméo et Juliette de Gounod par Mirella justement, que j’adore, mais dont le français est aussi atroce que celui de Pavarotti.
Bref, j’ai finalement réussi à traîner Paul dehors au bout de 2 heures.

carnegie-99.JPG

Puis le jour du concert est enfin arrivé. C’est quand même une sacrée sensation de rentrer à Carnegie par la porte des artistes. Bon, cela dit les coulisses n’ont rien d’extraordinaire, c’est même assez petit, mais ça ne nous a pas empêché Paul et moi de prendre des dizaines de photos pour immortaliser l’instant.

Pavlina a débarqué pendant la répétition, insérée dans une monumentale robe verte qu’Elad résumera plus tard en 2 mots: "Christmas tree. Tu devrais prendre une photo avec elle, tu rajoutes des cadeaux à ses pieds avec Photoshop et tu envoies ça comme carte de vœux." Elle a trouvé la mienne "wonderrrful", ce qui a été la vraie validation de l’investissement.

Le concert s’est très bien passé, c’était probablement notre meilleure performance.
A la pause, Elad et Camille sont venus me rejoindre dans les coulisses pour me raconter le début du concert avec les mimes assortis. Il parait que Pavlina a fait un discours où elle a raconté la fameuse anecdote Schumann-Chopin puis elle a annoncé en grande pompe un special guest (Elad a dit qu’on avait l’impression que les paparazzis se battaient devant la porte), qui se trouvait être... la Consule de Pologne. Ouais, trop bien. Celle-ci s’est juchée sur scène et a déballé un speech sur Chopin, sûrement pompé sur Wikipedia, comprenant le même épisode! Comme quoi elle avait bien écouté ce qui la précédait.

Les deux compères ont ensuite rejoint Avigail et Javor au balcon, d’où ils ont pu faire des photos du salut final, et Elad a même eu la présence d’esprit de filmer le laïus final de Pavlina, d’après Avigail, elle a répété au moins 4 fois le mot gratitude. Et moi j'avais un mal fou à garder mon sérieux en voyant les autres se marrer comme des baleines au poulailler.

Carnegie-night--1554.JPG

Mais le plus beau restait à venir. Le traditionnel buffet raisins-crackers-cheese et pizza suivait le concert, et en entrant, le choc, j’ai eu l’impression de pénétrer dans un zoo: un bestiaire chamarré de tout poil, surmonté par des visages liftés-botoxés. C’était un peu effrayant. Comme d’habitude, nous avons envahi la place, surtout le coin pizza. Elad et Camille, très en forme l’un comme l’autre, ont pourchassé Pavlina dans toute la pièce, paparazzant le moindre de ses faits et gestes. Mais lorsqu’elle a vu que l’on prenait des photos avec Javor, elle est venue d’elle-même et elle a fait tomber la fourrure pour l’occasion. Voyant cette scène, Elad est évidemment accouru au triple galop. Bref, d’une part de pizza à l’autre, nous avons fini par nous rendre compte que nous étions les seuls restants! Nous avons déclaré ouverte notre fête privée. Le serveur était très sympa et a sorti une nouvelle bouteille de champagne pour nous permettre de trinquer avec les flûtes en plastique. Du coup, à la place d’aller boire un verre ailleurs comme prévu, nous sommes restés des heures là-bas!

Pour finir, en rentrant dans le métro, on a vu un type avec un bonnet en forme de tête de loup. C’est la mode d’avoir des chapeaux animaux cette année, mais lui c’était vraiment énorme! Et tout le monde autour qui faisait semblant de ne pas remarquer. Elad est immédiatement allé s’asseoir à la place libre à côté de lui, pendant que Camille prenait tout ça en photo. Johannes a dit qu’il avait perdu au moins 2 kilos à force de rigoler ce soir-là.

 IMG_1626.JPG

Commenter cet article